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« Cette loi condamnerait les Marocains qui ont des contacts économiques, politiques, culturels, artistiques ou autres avec Israël à 2 à 5 ans d’emprisonnement et à des amendes de 10 000 à 100 000 euros. »

Paris, le 26 novembre 2013

Dans une lettre adressée au roi du Maroc, Mohammed VI, le directeur des Relations internationales du Centre Simon-Wiesenthal, Shimon Samuels, attirait son attention sur le fait que « Votre Majesté se trouvait à Washington pour discuter avec le président Obama et son administration du rôle de votre pays dans le maintien de la stabilité démocratique, en ces temps orageux de défis sécuritaires dans votre pays et dans toute la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) ».

M. Samuels alertait le roi en ces termes : « En votre absence, divers groupes de votre parlement tentent de nuire à l’image du Maroc – à sa réputation de tolérance, à sa position d’allié de l’Occident et aux liens chaleureux qu’il entretient de longue date avec la diaspora juive marocaine des Etats-Unis, d’Europe et d’Israël. » 

La lettre évoquait qu’« en 1492, votre dynastie avait accueilli les réfugiés musulmans tout autant que leurs voisins juifs, ces deux communautés ayant été expulsées de l’Espagne chrétienne intégriste. Ces immigrants juifs ont grandement contribué à la prospérité du Maroc, et leur départ d’Espagne a parallèlement engendré un net déclin du pouvoir espagnol ». 

La lettre soulignait en outre que « plus de 250 000 de vos anciens sujets se rappellent encore avec émotion la protection dont ils avaient bénéficié durant la Seconde Guerre mondiale de la part de votre grand-père, le roi Mohammed, face aux lois antisémites de la France de Vichy. Des milliers de Juifs, la plupart devenus aujourd’hui israéliens, se rendent chaque année au Maroc en tant que touristes, pèlerins sur les tombes de leurs aïeux ou en délégations commerciales et culturelles ». 

M. Samuels ajoutait : « Votre Majesté, sachez que plusieurs partis politiques tentent à votre insu de faire adopter par le Parlement une loi intitulée “Criminaliser la normalisation avec l’entité israélienne”. Cette loi entend prohiber toute participation par des citoyens et résidents marocains à des activités où des individus ou des organismes israéliens sont impliqués. La sanction pour ces faits s’élèverait à deux à cinq ans d’emprisonnement ainsi qu’à des amendes de 10 000 à 100 000 euros. La liste des relations interdites est la suivante : “contacts économiques, politiques, culturels, artistiques ou autres.” » 

La lettre alléguait que « non seulement cette mesure mettrait les Juifs qui résident au Maroc en danger, mais elle créerait un précédent pour l’exclusion d’autres minorités, provoquant le naufrage des droits de l’homme que Votre Majesté a promulgués en 2011 dans sa constitution. Sans compter les projets d’investissements étrangers, présents et futurs, qui risqueraient bien de ne pas se concrétiser ». 

La lettre se poursuivait en ces termes : « Cette proposition de loi inclut “une déclaration de guerre diplomatique” contre tous les pays qui ont des citoyens possédant la nationalité israélienne, ainsi que contre tous les Marocains qui ont des parents en Israël. Ces dispositions enfreignent le règlement contre la discrimination institué par le Conseil de l’Europe et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Le Maroc est d’ailleurs lié avec cette dernière organisation en tant que pays observateur. » 

Le Centre priait instamment le roi Mohammed VI d’« invoquer votre pouvoir souverain pour défendre la constitution et faire en sorte que ce projet de loi anticonstitutionnel et nuisible demeure à l’état de projet ».