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Ma lettre ouverte au ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault : « L’Argentine commémore l’attentat du centre juif Amia – La France rencontre le Hezbollah » est parue en anglais le 18 juillet 2016 sur :

http://blogs.timesofisrael.com/an-open-letter-to-french-foreign-minister-jean-marc-ayrault-argentina-commemorates-the-amia-jewish-centre-bombing-france-meets-with-hizbollah/.

M. Jean-Marc Ayrault, Ministre des Affaires étrangères, 37, quai d’Orsay, 75007 Paris

Buenos Aires, le 18 juillet 2016

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères,

Aujourd’hui, l’Argentine commémore le 22e anniversaire de l’attentat perpétré contre l’Association mutuelle israélite argentine (Amia).

Le 18 juillet 1994, 85 personnes trouvèrent la mort et plus de 300 furent blessées sous les coups du mouvement terroriste libanais chiite Hezbollah, financé et planifié par la République islamique d’Iran.

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, la semaine dernière vous vous trouviez à Beyrouth, où vous auriez rencontré la direction du Hezbollah, affirmant que vos interlocuteurs appartenaient à l’aile politique djihadiste et non pas à leur vulgaire section militaire – un argument qui tente de dissocier la poule de l’œuf.

L’enquêteur de l’attentat d’Amia, le procureur Alberto Nisman – assassiné depuis –, était sur le point de fournir un rapport sur la présence actuelle du Hezbollah dans la région sans foi ni loi que constitue la triple frontière entre l’Argentine, le Brésil et le Paraguay, ainsi que sur les quelque quatre-vingt-dix cellules dormantes disséminées à travers l’Argentine et qui attendent l’ordre d’attaquer.

M. Nisman signalait également que des escadrons de la terreur, sous contrôle iranien, agissaient notamment au Venezuela, au Surinam, au Honduras et à Trinité-et-Tobago.

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères,

- Vous êtes-vous entretenu avec le Hezbollah des nouveaux ordres d’extradition émis par l’Argentine pour les six Iraniens inculpés, pour qui Interpol a publié une Notice rouge sur la base des mandats d’arrêt délivrés ? Vous avez peut-être proposé – en tant qu’honnête médiateur – qu’un tribunal parisien se charge de les juger, maintenant que l’auteur de l’attentat de la synagogue Copernic, en 1980, Hassan Diab – extradé du Canada vers la France pour que justice soit rendue aux familles des victimes, après 36 ans d’attente – sera bientôt libéré ?

- Avez-vous soulevé la question des 120 000 missiles du Hezbollah qui visent Israël, et qui figurent dans plusieurs propositions de caricatures pour le concours de dessins négationnistes de Téhéran ?

- Avez-vous discuté des atrocités commises par le Hezbollah sur la population civile syrienne en soutien aux massacres génocidaires de Bashar el-Assad ?

- Avez-vous protesté contre l’attaque meurtrière perpétrée par le Hezbollah contre des touristes israéliens en Turquie ?

- Vous avez sans doute mis le Hezbollah en garde contre les jeux d’influence qui risquent de ramener l’ancienne colonie de la France, le Liban, à la guerre civile.

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, quels profits la France a-t-elle tirés de cet entretien ?

- des conditions d’investissement pour étayer la paix au Liban et dans la région ?

- une fois les sanctions levées, une porte ouverte pour l’Europe sur le marché iranien ?

- un rôle pour le Hezbollah dans l’Initiative de paix au Moyen-Orient, dirigée par Paris et dont Israël a été exclu ?

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, vous connaissez sans doute les risques encourus par ceux qui négocient avec des terroristes – l’ancienne administration argentine avait utilisé un euphémisme du nom de « Mémorandum de la Commission pour la paix avec l’Iran ».

Le président Obama quant à lui a appelé son accord nucléaire avec l’Iran le « plan d’action global conjoint » (Joint Comprehensive Plan of Action, JCPOA).

Si le Hezbollah chiite renonce à toute transaction avec Paris, il y a peut-être un programme alternatif français viable pour que l’Etat islamique traite avec l’EI sunnite ?

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mon profond respect.

Shimon Samuels, directeur des Relations internationales, Centre Simon Wiesenthal