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Éditorial de Shimon Samuels publié en anglais dans The Jerusalem Post
le 16 février 2020
https://www.jpost.com/Opinion/Churchills-definition-of-Belgium-A-manufactured-country-617734

C’est au motif d’‘‘usure’’ que le duc de Brabant a déporté les Juifs d’Anvers en 1261. Il avait réclamé leur expulsion ou leur anéantissement.

16 Feb. 2020
Sir Winston Churchill, 1941 (photo Biblioarchives/Libraryarchives/Flickr).

Au moment où la Belgique mène une campagne du Conseil de sécurité des Nations unies contre Israël, tandis qu’au même moment à Jérusalem le Forum sur l’Holocauste pleure les Juifs morts il y a soixante-quinze ans, cette définition de Winston Churchill peut paraître éminemment pertinente :

« Partout où il y a trois Juifs, on trouvera deux Premiers ministres et un chef de l’opposition. Ceci s’applique aux Belges flamands et wallons. La Belgique est un ‘‘pays fabriqué’’. Il est rare qu’une opinion satisfasse les deux camps. »

Tandis que le colonialisme belge au Rwanda-Burundi et au Congo, qui a duré quarante ans (1922-1962), a surtout attiré des marchands occupés à s’enrichir plus ou moins honnêtement, une seconde vague de colons, des « eugénistes » plus brutaux, est allée mesurer la circonférence des crânes et des nez tutsi à l’aide de compas. Obsédés par leur classification raciale/ethnique, ils ont affirmé que les Tutsi étaient supérieurs aux Hutu et ils ont curieusement appelé les Tutsi « les Juifs d’Afrique ». En fait, leurs expériences tordues anticipaient celles de Josef Mengele. La Belgique a ainsi laissé un héritage qui a resurgi en 1994 avec le génocide rwandais.

C’est au motif d’« usure » que le duc de Brabant a déporté les Juifs d’Anvers en 1261. Il avait réclamé leur expulsion ou leur anéantissement. Au XIVe siècle, un autre duc de Brabant a expulsé les Juifs de Bruxelles et de Liège.

En avril 1941, quelque deux cents activistes nationalistes flamands ont perpétré « le pogrom d’Anvers », incendiant deux synagogues et saccageant les magasins juifs. En 1942-1944, plus de vingt-cinq mille Juifs furent déportés de Belgique, la plupart vers Auschwitz, via le camp de transit SS de Malines. Moins de mille d’entre eux n’en sont revenus.

Alors que quelque 20 % de ces Juifs belges furent arrêtés par la police locale, la plupart furent cachés par des Justes parmi les nations, et beaucoup d’autres rejoignirent la Résistance.

Notre bureau a suivi les activités d’après-guerre de Léon Degrelle, un collaborateur wallon qui s’était enrôlé dans une division SS puis avait fui en 1945 dans l’Espagne de Franco. Il y avait dirigé des groupes néo-nazis et négationnistes comme le Cedade (Cercle espagnol des amis de l’Europe) et sa maison d’édition à Barcelone. Diverses tentatives d’extrader ce criminel de guerre vers la Belgique pour le juger ont échoué, même après la mort de Franco et la fin de son régime, sans doute du fait d’un manque de volonté politique.

Cependant, en 1991, nous avons soutenu devant la Cour constitutionnelle espagnole une rescapée, Violeta Friedman, dans son procès contre le négationnisme de Degrelle. Celui-ci a été condamné pour « offense à l’honneur et à la mémoire des victimes ». La décision de la Cour a marqué un précédent qui a entraîné une réforme du Code pénal espagnol.

Jusqu’à sa mort en 1994, Degrelle avait menacé le Centre Wiesenthal de poursuite en diffamation pour l’avoir traité de criminel de guerre belge.

En 2017, la Belgique et la France ont soumis au Comité du patrimoine mondial de l’Unesco une liste de cent trente-sept cimetières de la Première Guerre mondiale, qui devaient faire office de symboles de réconciliation. J’assistais à cette session et j’y ai signalé des sites où des tombes de la Seconde Guerre mondiale s’y trouvaient également.

Du côté français, le cimetière militaire de La Cambe abrite les tombes de SS responsables du massacre d’Oradour-sur-Glane, où six cent quarante-deux villageois furent brûlés vifs en représailles contre la Résistance.

La liste belge comprend la tour de l’Yser, à Dixmude, un monument à la mémoire des soldats tombés pendant la Première Guerre mondiale qui est devenu un lieu de pèlerinage pour le mouvement nationaliste flamand. Depuis vingt-cinq ans, les néo-nazis de toute l’Europe s’y rassemblent.

J’ai avancé qu’« aucune réconciliation n’est possible entre les fils de la Lumière et les fils des Ténèbres de la Seconde Guerre mondiale ».

L’ambassadeur de France a annoncé avec diplomatie que le projet dans sa totalité serait retiré. Son homologue belge a été moins poli.

En 2009, l’Unesco a accordé à la ville belge d’Alost le statut de Patrimoine culturel de l’humanité. Dans l’édition 2013 de son carnaval, un char transportait des personnages déguisés en SS qui en fouettaient d’autres déguisés en détenus de camps de concentration et tenant des bidons étiquetés « gaz Zyklon B ».

En 2019, un char défilait avec des personnages de Juifs stéréotypés empoignant des pièces d’or et infestés de rats. Bien que les autorités belges aient défendu cette mascarade scandaleuse au nom de la liberté d’expression, l’Unesco a rejoint l’opinion juive en retirant à Alost son statut de Patrimoine mondial. Et pourtant, des autocollants et des rubans préparés pour le festival 2020 ne laissent rien présager de bon, et l’on n’ose guère espérer une intervention du gouvernement belge.

Bruxelles, « la capitale de l’Europe », affirme que la communauté juive est florissante mais qu’elle est frappée par rien de moins qu’un terrorisme antisémite émanant d’un islam radical et djihadiste sur fond de démographie en pleine croissance.

À Anvers vit une communauté juive d’une certaine importance – essentiellement orthodoxe –, dont nombreux sont ceux qui travaillent dans l’industrie du diamant. Lors d’une réunion de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, un représentant anversois a appelé le quartier limitrophe « la Petite Gaza ».

Il est tout aussi fascinant de découvrir sur le site Wingie.com – censé être une agence de voyage bon marché en ligne – qu’y sont proposés des vols directs depuis Anvers vers l’« aéroport international Yasser-Arafat, Gaza, Territoires palestiniens occupés ». Mais, fort heureusement, aucun vol n’y est disponible.

La « politique » actuelle du gouvernement belge contre l’État juif est le dernier maillon d’une longue chaîne d’antisémitisme, bien que le Premier ministre fédéral actuel soit une femme de confession juive.

Le Centre Wiesenthal a imposé des « avertissements aux voyageurs » dans des cas similaires. En outre, l’industrie du diamant devrait peut-être envisager de quitter « la Petite Gaza ».

L’auteur de ces lignes est le directeur des Relations internationales du Centre Simon Wiesenthal.